Réforme des modes d’accueil de la Petite Enfance : la mobilisation se poursuit

Une nouvelle journée de mobilisation des professionnels de la Petite Enfance a eu lieu dans toute la France jeudi 23 mai, deux mois après le succès des manifestations du 28 mars. A Grenoble, ils, ou plutôt elles, étaient environ 200.

Depuis la mobilisation du 28 mars, les professionnels de la Petite Enfance sont toujours dans l’incertitude quant au contenu de la réforme en cours sur les modes d’accueil. Le collectif Pas de bébés à la consigne, qui mène la contestation au niveau national, a indiqué dans un communiqué du 20 mai que « le gouvernement vient de diffuser un projet de dispositions qui confirme notre alarme ».

Les professionnels craignent un assouplissement des règles en vigueur dans les crèches – censé répondre à la pénurie de places – qui conduirait à la dégradation de l’accueil des enfants et de leurs conditions de travail : diminution du taux d’encadrement, baisse du ratio des personnels les plus qualifiés, augmentation de l’accueil en surnombre, baisse de la surface d’accueil par enfant…

Tous le disent : dégrader les conditions actuelles d’exercice, souvent difficiles, aurait un impact sur les enfants en premier lieu. Ils regrettent aussi un temps d’échange trop limité entre personnels et avec les parents, notamment en cas de besoins spécifiques (handicap, maladies chroniques, difficultés sociales, psychologiques ou économiques…). « Nos employeurs demandent aux professionnels de travailler avec les familles, les partenaires, les psychologues, les médecins, d’accueillir des enfants porteurs de handicap, de monter des projets, mais sans temps hors présence des enfants », résume Marie Licata, auxiliaire puéricultrice et représentante de la CFDT au Centre communal d’action sociale (CCAS) de Grenoble. Le syndicat estime que « les conditions de travail difficiles et des salaires peu attractifs expliquent la difficulté de recrutement dans ces métiers ».

A Grenoble, une délégation de sept personnes, composée de représentants syndicaux et professionnels du secteur, a été reçue par le chef de cabinet du Préfet. Elle a fait connaître ses revendications, notamment : retour à un ratio de 50% – contre 40% aujourd’hui – des professionnels les plus qualifiés ; accueil en surnombre limité à 110% de l’effectif, maintient de l’encadrement d’un professionnel qualifié pour 5 enfants qui ne marchent pas, et 8 qui marchent et d’une surface d’accueil de 7 mètres carrés par enfant sur tout le territoire (et non 5,5 m2 en zone urbaine dense).

D’après les chiffres de la CFDT, 50% du personnel du CCAS de Grenoble était en grève. La ville de Grenoble a annoncé la fermeture totale de quatre crèches municipales et la fermeture partielle de quatorze autres, sur les 28 Établissements d’accueil du jeune enfant (EAJE) de la ville. « Financièrement, ce n’est pas facile pour les personnels de se mobiliser plusieurs fois. D’autant qu’il y a eu d’autres mouvements sociaux dernièrement, notamment pour la défense de la fonction publique », explique Marie Licata. Les professionnels grenoblois peinent aussi à mobiliser les parents. En 2010, une branche locale du collectif Pas de Bébés à la consigne avait contribué à renforcer la mobilisation contre le « décret Morano » (finalement adopté) qui visait déjà à assouplir les règles dans les crèches. A ce jour, le collectif grenoblois n’a pas été réanimé.

La pétition lancée il y a deux mois par Pas de bébés à la consigne pour « un printemps des modes d’accueil », vient de passer le cap des 30 000 signatures. Alors que « les conditions d’accueil n’ont cessé de se dégrader depuis dix ans », il réclame une réforme ambitieuse développant largement l’offre (400 000 places dont 200 000 en accueil collectif) tout en assurant « sa plus ample qualité ».

Les ambitions gouvernementales semblent loin du compte. La convention d’objectifs et de gestion entre l’État et la Caisse nationale d’allocations familiales annonce la création de 30 000 « solutions » d’accueil d’ici à 2022. Dans son rapport d’avril 2018, le Haut conseil de la famille, de l’enfance et de l’âge (HCFEA) évoquait pourtant un besoin de créer « a minima » 230 000 places d’accueil dans les cinq ans.

Elisa Martin, première adjointe au maire en charge de la Petite Enfance à Grenoble, dénonce le manque de financements publics pour la création de places d’accueil, et assure les professionnel(le)s du secteur du soutien des élus grenoblois dans cette mobilisation, tout en reconnaissant les problèmes rencontrés par les familles les jours de grève. « Les enfants ne sont pas des paquets. Il faut qu’ils soient encadrés par des adultes qualifiés, bienveillants, en nombre suffisant et dans des locaux adaptés pour que leur sécurité, aussi bien corporelle qu’affective, soit assurée », déclare l’élue.

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